«Aujourd’hui, nous avons au Sénégal beaucoup de textes qui sont dépassés et qu’il faut oser réformer. J’ai toujours provoqué ce débat et il se pose de manière malheureuse aujourd’hui. Le Sénégalais établi à l’étranger est électeur. Un quota de députés est attribué aux Sénégalais de l’extérieur. Un émigré a le droit d’être membre d’un parti politique et même chef de parti. Un Sénégalais établi à l’étranger est éligible à l’essentiel des fonctions au Sénégal. Beaucoup de ces droits n’étaient pas accordés aux émigrés sénégalais en 1981 et 1989, respectivement années d’adoption et de modification de la Loi n° 81-17, du 06 mai 1981, relative aux partis politiques, invoquée pour menacer le parti Pastef de dissolution. L’incohérence se trouve, en réalité, dans l’inadéquation entre beaucoup de nos textes et l’évolution de certaines de nos réformes et de multiples droits acquis par des catégories de Sénégalais qui étaient injustement discriminées. Pourquoi la participation des Sénégalais de l’extérieur au financement des partis politiques dont ils sont membres doit-elle être considérée comme une collecte de subsides en provenance de l’étranger ? L’esprit de la loi est d’empêcher les financements occultes par des forces étrangères. L’émigré n’est pas une force occulte, encore moins son complice.
Le caractère partisan de la menace se trouve dans la non-évocation de la loi contre des partis de la coalition au pouvoir dont plusieurs ont été et restent toujours financés avec des subsides provenant de l’étranger. Combien de fois avons-nous entendu d’illustres leaders politiques remercier publiquement des compatriotes établis à l’étranger pour leurs contributions financières et matérielles au fonctionnement de leurs partis ou à la prise en charge d’une partie de leurs dépenses de campagnes électorales ? Les preuves sonores sont encore disponibles. Pourtant, cette loi n’a jamais été évoquée contre ces gens. Il y a beaucoup d’incohérences et d’incongruités, autant d’errements et d’erreurs pour donner l’impression qu’on peut utiliser les textes contre des forces concurrentes ou adverses. Ce qui ne participe pas à apaiser la démocratie et le champ politique sénégalais. Toutefois, le communiqué est fondé en Droit, mais les dispositions sont dépassées et en déphases avec l’évolution de la politique sénégalaise. Si on doit appliquer cette loi, il faut l’appliquer sur tout le monde. Et non prendre prétexte d’une approche innovante de Pastef pour faire respecter la loi. Il faut aller dans le sens de créer un Conseil supérieur national des partis politiques où l’opposition et la mouvance présidentielle devront être représentées et qu’il soit dirigé par la société civile.»
Dr Aliou Sow, ancien ministre, président du parti MPD Liggeey